Courtois

Courtois était un homme assez ordinaire,
Il portait bien ses cinquante ans passés
Il était resté célibataire,
Il habitait le village de Saint André.

Si je vous raconte cette histoire,
C'est que le bonhomme était spécial
Il circulait à travers le territoire
Afin de satisfaire un appétit anormal.

Il s'était fait beaucoup de connaissances
Dans sa commune et dans la nôtre aussi,
Régulièrement il les honorait de sa présence
Dans le but de recevoir un bon repas gratuit.

Un matin de très bonne heure
Il débarqua chez un voisin,
Il était à peine sept heures
Mais le long trajet lui avait donné faim.

Le patron sortit sur la table
Une grosse miche de pain,
Des charcuteries et des fromages
Ainsi qu'un litre de vin.

Il abandonna pour un moment son convive
Pour aller soigner son troupeau,
A son retour il eût la surprise
De voir Courtois avaler le dernier morceau.

Le fermier faisait mauvaise mine,
Et le bonhomme tout de suite comprit
Qu'il était temps qu'il se débine
Tout doucement, sans faire de bruit.

Un peu plus tard, le mot toujours aimable
Il rentra dans une autre maison,
Les gens se mettaient à table,
Il ne rata pas l'occasion.

La route disait-il avait été longue
Celà lui avait ouvert l'appétit
Il n'étonna donc pas son monde
En vidant les plats petit à petit.

Sans plus tarder il reprit la route,
Vers dix heures, il arrivait chez nous,
Grand-père était en train de terminer sa soupe,
Courtois accepta de manger un petit bout.

Grand'mère, aussitôt, fit une grosse omelette
Où elle avait fait frire des oignons,
En plus elle avait ajouté des blettes,
Le parfum embaumait toute la maison.

Avec des compliments, il fit honneur à la table,
Se resservit plusieurs fois, tout en discutant
Il avait un problème avec le pain et le fromage
Il n'arrivait jamais à finir les deux en même temps.

Ne voulant pas trop retarder ses hôtes
Il prit congé, tout en remerciant,
Il fallait qu'il se rende sans faute
Saluer ses amis qu'il n'avait pas vus depuis longtemps.

Mr et Mme Cavalier le connaissaient depuis des ans
Ils ne furent donc pas surpris
De le voir avaler si goulûment
Un gros bol de café et un paquet de biscuits.

Dans son village, c'était un peu la vedette
Les gens l'invitaient volontiers,
Surtout les jours de grande fête
Pour le plaisir de le voir dévorer.

Il s'infiltrait aussi parmi la jeunesse
Pour boire à l'oeil et bien manger
Mais un jour, ils décidèrent que celà cesse
Ils mirent au point un tour pour s'en débarrasser

L'un d'eux fêtait son anniversaire
Il invita ses copains pour un repas,
Bien sûr, comme à l'ordinaire
Ils eurent la visite de Courtois.

En ce temps-là c'était l'usage
De servir avant le plat principal
Une grosse soupière de potage
Où les jeunes ajoutèrent une purge de cheval.

Tous les copains boudèrent ce breuvage
Disant qu'ils n'avaient pas très faim,
L'intrus se mit à table sans ambages
Mangea trois assiettes avec entrain.

Quelques instants plus tard il fila vers les toilettes
Se vidant par derrière et par devant,
La dégustation de cette nouvelle recette
Lui coupa l'appétit pour un certain temps.

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